« Tartuffe » est avant tout le procès magistral des faux dévots et des vrais hypocrites. Molière y dénonce avec vigueur et truculence le fanatisme religieux. Tartuffe s’immisce avec malice et délice chez le pauvre vieux Orgon pour y faire des ravages. Le grand intérêt de la pièce reste incontestablement d’avoir attendu le troisième acte pour faire entrer le personnage phare, ménageant bon train un suspens gentiment excitant. Philippe Ferran, qui signe la mise en scène, a choisi de se jouer des codes de la représentation pour précisément donner à voir le jeu des faux-semblants. On est au théâtre et on le montre. Et ce dès le début. En prenant place dans la salle, entre étirements et vocalises, les comédiens se préparent sur scène. Le décor est réduit au minimum et entre chaque acte, on fera résonner le brigadier. Déboires, complots, discussions, révélations sont rondement menés par la troupe de comédiens. Ils sont dix sur scène et ont beaucoup de talent. Philippe Ferran a d’ailleurs particulièrement soigné sa direction d’acteurs. Marc Chapiteau est un Tartuffe assez décalé mais intéressant. Face à lui, Jean-Paul Dubois est un parfait Orgon aussi touchant qu’agaçant dans sa crédulité. Laurence Guillermaz et Hélène Gédilaghine jouent de leurs charmes. On n’oubliera pas de saluer la prestation de Patricia Varnay, excellente Dorine, éclatante d’énergie et d’humour. On ne s’ennuie pas une minute en leur compagnie et la soirée est délicieuse…
Dimitri Denorme